Grange parle sans langue de bois: "Je suis Romain Grange, pas Ronaldo ou Messi"
Trois mois après son arrivée en provenance de Niort (Ligue 2), le Français ne s’est pas encore imposé à Charleroi.
- Publié le 12-04-2018 à 10h23
- Mis à jour le 12-04-2018 à 13h35
Trois mois après son arrivée en provenance de Niort (Ligue 2), le Français ne s’est pas encore imposé à Charleroi. "Un pied droit de fou", "petit Beckham", "il met le ballon où il veut". Dès son arrivée à Charleroi, début janvier, les superlatifs n’ont pas manqué pour présenter Romain Grange (29 ans). Transféré en provenance de Niort, avec le statut de meilleur joueur de Ligue 2 (selon les statistiques de France Football), le médian français de 29 ans était annoncé comme une super pioche. 310 minutes de jeu, une blessure, aucun but ni aucun assist plus tard, c’est avec les U21 que Grange a disputé son dernier match, lundi, contre Courtrai (deux assists pour Pollet).
Faut-il dès lors encore conclure que son transfert est un échec ? Le principal intéressé, qui n’a rien perdu de sa sympathie malgré des semaines compliquées, s’en défend et dresse un premier bilan de son aventure zébrée. Sans langue de bois.
Romain, après trois mois à Charleroi, on attend toujours votre premier coup d’éclat.
"J’essaie pourtant de faire le maximum pour qu’il arrive ( sourire ). Que ce soit aux entraînements ou lorsque je rentre, en match. Je n’ai pas encore été décisif, c’est vrai, mais je n’ai été titulaire que trois fois. Le reste du temps, je suis entré en jeu en cours de rencontre. C’est plus compliqué d’être efficace dans ces conditions. Mais je ne vous cache pas qu’un petit but ou une passe décisive me ferait du bien."
Vous manquez de confiance ?
"Je ne suis pas du genre à me prendre la tête ou à perdre confiance en moi. Disons que je pourrais être mieux, c’est sûr, mais je ne suis pas au fond de la gamelle."
À Niort, vous aviez un statut de titulaire. À Charleroi, ce n’est pas encore le cas.
"On est un niveau au-dessus, c’est assez normal. Il me faut un temps d’adaptation. En Belgique, je n’ai encore rien prouvé. Je repars de zéro. C’est un travail au quotidien. Je dois convaincre le coach et mes équipiers qu’ils peuvent me faire confiance."
De l’extérieur, on a l’impression que vous ne trouvez pas votre place dans le système de Felice Mazzù.
"J’en ai discuté avec le coach. Il a vu que j’étais un joueur qui aimait beaucoup rentrer dans le jeu. Il m’a dit que dans son système, il me considérait plus comme un joueur axial que comme un joueur de couloir."
Pourtant, vous étiez ailier droit à Niort.
"Oui, dans un 4-3-3. J’ai d’ailleurs joué la majorité de mes matches en France sur un côté, droit ou gauche. Je peux évoluer comme numéro 8, numéro 10 ou sur un flanc. Mais quelle que soit la position, j’aime toucher beaucoup de ballons et rentrer dans le jeu. Je n’ai pas la vitesse d’un Mamadou Fall. Et mon manque de vitesse, même si je ne suis pas lent, se ressent sans doute moins à l’intérieur du jeu."
Physiquement, on vous a senti un peu court à votre arrivée.
"Mais désormais, je sens que j’ai franchi un cap. En France, mon coach me regardait souvent vers la 70e minute pour savoir si je devais sortir ou non. Il ne faut pas oublier que je viens de Ligue 2, un championnat où on défend moins qu’en Belgique. Et où ça joue plus à la baballe. Ici, ça presse de partout, même dans le rond central. Même en Ligue 1, il n’y a pas autant de pressing qu’en Belgique. Cela va très vite d’un côté à l’autre. Et cela demande aussi de savoir défendre. Ce que je sais faire. Quand j’ai joué le maintien avec Nancy, j’ai beaucoup défendu. Et cela ne me dérange pas, même si je suis plutôt un joueur de ballon."
Qui recherche constamment la passe tranchante.
"Exactement. Dès que j’ai le ballon, j’arrive à voir des passes assez difficiles. J’aime jouer vers l’avant et éliminer une ligne avec une passe. C’est ça, mon jeu."
Vous n’êtes donc pas un dribbleur.
"Si je peux éliminer, je le fais. Mais je ne suis pas le gars qui va dribbler quatre ou cinq joueurs. Je suis Romain Grange, pas Ronaldo ou Messi. ( rires ) Si les supporters s’attendaient à voir un joueur dans ce style, il faut leur dire la vérité : je ne suis pas comme ça. Moi, mon modèle, c’est plutôt Iniesta. Il ne va pas très vite, il ne fait pas quatre passements de jambes, il n’est pas hors-norme physiquement, mais c’est l’un des meilleurs joueurs car il arrive à trouver des passes que personne ne va trouver. Je suis plus dans ce profil-là, on va dire. Pour moi, une passe est plus jouissive qu’un dribble."
Est-ce compatible avec le style de Charleroi ? Le dernier qui avait un profil comparable au vôtre, c’est Sotiris Ninis. Et il n’a pas réussi…
"J’espère ne pas être un échec à mon tour. J’ai 29 ans et 200 matches professionnels à mon actif donc je pense pouvoir m’adapter. Je dois encore m’intégrer dans le style de l’équipe, faire en sorte que les autres me comprennent et les comprendre. Le coach connaît mes qualités et m’aide à avancer. Parfois, il demande des exercices à une ou deux touches à l’entraînement. Moi, j’en fais trois puis il rend le ballon à l’adversaire ( rires ). C’est frustrant mais cela nous oblige à jouer vite. Et aller rapidement vers l’avant, c’est quelque chose que j’apprécie. Plus les matches avancent, plus je me dis que ça va bien se passer. Ne vous inquiétez pas : je suis content d’être ici."
Dylan Bronn: "Romain a tout pour réussir"
Le défenseur gantois a évolué avec le Zèbre à Niort. "Il voit plus vite que tout le monde"
En Belgique, il y a deux joueurs qui connaissent Romain Grange sur le bout des doigts : Amara Baby (formé avec le Français à Châteauroux) et Dylan Bronn, le défenseur tunisien de Gand, qui a évolué avec Grange à Niort, en L2, la saison dernière.
"Romain, c’est un top joueur", précise l’international tunisien. "Il a des pieds… C’est de l’or ! Il fait ce qu’il veut avec le ballon, il le dépose où il veut. C’est un joueur qui apporte énormément à son équipe, qui voit plus vite que tout le monde et qui va toujours vers l’avant. C’est une assurance de buts et de passes décisives. Il est, de loin, le meilleur tireur de coups francs de Belgique. Il a une puissance incroyable dans la jambe."
Avec un tel portrait , comment expliquer que Grange ne se soit pas encore imposé à Charleroi ?
"C’est difficile à dire, mais la Belgique, c’est un autre pays, une autre culture. Je ne peux pas vous dire exactement pourquoi il n’est pas encore tout à fait intégré, mais ce que je sais, c’est que c’est un super joueur et un super gars. J’espère qu’il aura sa chance car je ne pense pas que Charleroi le regrettera. Il est exceptionnel. Il a tout pour réussir en Belgique. Car je le répète : Romain Grange, c’est du très, très lourd."